Paul (5 de 6)

Paul (5 de 6).

13. Paul a-t-il été relâché après sa comparution devant l’empereur ? La fin des Actes relate que, 3 jours après son arrivée à Rome, l’apôtre fit appeler les principaux Juifs, leur dit la raison de sa présence à Rome, et fixa un jour pour leur exposer l’Évangile. Comme partout, les uns l’acceptèrent, les autres le repoussèrent ; Paul déclara alors que ce message serait prêché aux païens, et qu’ils l’écouteraient. En effet, sa condition de prisonnier ne l’empêcha pas de poursuivre son ministère. Les derniers versets du livre des Actes rapportent que, pendant 2 ans, Paul reçut tous ceux qui désiraient lui parler ; il leur annonça le Royaume de Dieu, enseigna ce qui concerne le Seigneur Jésus-Christ, sans que les autorités y missent obstacle (#Ac 28:17-31). Les épîtres aux Colossiens, à Philémon, aux Éphésiens, aux Philippiens, rédigées durant la captivité, jettent une vive lumière sur cette période. L’apôtre écrivit sans doute les 3 premières au début, et la lettre aux Philippiens à la fin de sa détention. Ces épîtres révèlent qu’à Rome de fidèles amis de Paul l’assistaient dans son œuvre missionnaire. Il y avait entre autres : Timothée (#Col 1:1 ; #Ph 1:1; 2:19 ; #Phm 1:1) ; Tychique (#Ep 6:21 ; #Col 4:7) ; Aristarque (#Col 4:10 ; #Phm 1:24) ; Jean-Marc (#Col 4:10 ; #Phm 1:24) ; et Luc (#Col 4:14 ; #Phm 1:24). Personne n’empêchait les amis de l’apôtre de lui rendre visite ; messagers de Paul auprès des Églises, ils étaient aussi ses auxiliaires à Rome. Grâce à eux, et malgré sa captivité, Paul dirigeait les missions au travers de l’empire. Les épîtres de la captivité révèlent aussi le zèle de cet ambassadeur enchaîné, et l’accueil enthousiaste que rencontrait sa prédication (#Ep 6:20). Il exhorte instamment ses amis à prier Dieu d’ouvrir une porte à la Parole (#Col 4:3). Onésime, esclave fugitif, fut l’un des fruits du travail personnel de l’apôtre prisonnier (#Phm 1:10), qui écrit aux Philippiens : « Dans tout le prétoire et partout ailleurs, nul n’ignore que c’est pour Christ que je suis dans les liens » (#Ph 1:12,13). Il transmet aux Philippiens les salutations des croyants de la maison de César (#Ph 4:22). Il y avait cependant à Rome, à la même époque, des chrétiens (peut-être des judaïsants) qui s’opposaient à l’œuvre de Paul (#Ph 1:15-18). Leur antagonisme ne troublait point la sérénité du prisonnier, qui d’autre part était certain de son acquittement (#Ph 1:25; 2:17,24 ; #Phm 1:22). Il considérait sa captivité comme le moyen que Dieu avait choisi, pour lui permettre d’accomplir plus loin encore sa mission d’ambassadeur de Christ. Les lettres montrent enfin que le prisonnier ne cessa d’administrer les Églises par correspondance, réfutant en particulier les fausses doctrines qui surgissaient en Asie Mineure. Ces épîtres de la captivité contiennent l’enseignement le plus complet de Paul sur la personne de Christ et le dessein éternel de Dieu révélé dans l’Évangile. La ferveur de l’apôtre, sa conception élevée des devoirs du chrétien transparaissent dans ses directives pratiques.

      Bien que le livre des Actes s’achève par la captivité romaine de Paul, nous avons de bonnes raisons d’admettre que l’apôtre fut relâché au bout de 2 ans et recommença à voyager. Arguments étayant cette interprétation :

1. Le dernier verset des Actes concorde mieux avec l’hypothèse de la libération qu’avec celle de la condamnation à mort. En soulignant que personne n’empêche le travail de Paul, Luc donne l’impression que l’apôtre n’envisageait pas sa fin.

2. Paul lui-même est persuadé qu’il sera libéré (#Ph 1:25,26; 2:17,24 ; #Phm 1:22). L’attitude des autorités romaines envers lui permettait à l’apôtre de nourrir cet espoir. La persécution de Néron n’avait pas encore commencé. Quand elle éclata, ce fut soudainement, sans que des sévices officiels ne l’eussent fait prévoir. La loi romaine tenait encore les chrétiens pour des Juifs sectaires, autorisés à pratiquer leur religion. C’est pourquoi, on a tout lieu de penser que le tribunal impérial déclara Paul innocent et l’acquitta. D’autant plus que Festus, le procurateur de Judée, avait sans doute écrit un rapport favorable (#Ac 26:31) et que les Juifs n’envoyèrent à Rome, semble-t-il, aucun accusateur de Paul (#Ac 28:21).

3. La tradition de l’acquittement, de la reprise des voyages et de la seconde captivité remonte très haut. Clément de Rome (96 après Jésus-Christ) dit que les voyages de Paul atteignirent les confins de l’Occident, ce qui paraît indiquer l’Espagne. Le Fragment de Muratori (170 après Jésus-Christ) mentionne aussi le voyage en Espagne. Ces témoignages concordent avec l’Histoire Ecclésiastique d’Eusèbe (324 après Jésus-Christ), qui rapporte la tradition courante : « Lorsqu’il eut présenté sa défense, l’apôtre fut libéré et recommença ses voyages missionnaires. Étant revenu une seconde fois à Rome, il y subit le martyre. » Cette tradition qui ne repose pas sur des preuves absolument convaincantes, ne saurait, à elle seule, suffire à l’argumentation. Mais l’ancienneté de ces témoignages et leur autorité confirment les autres arguments, d’autant plus qu’il ne semble pas y avoir d’évidence contraire.

4. Des preuves nombreuses, externes et internes, attestent que les épîtres à Timothée et à Tite sont de Paul. Or les Actes ne mentionnent pas ces lettres, qui ont certainement été écrites plus tard. Cette constatation nous amène à retenir la tradition rapportée par Eusèbe.

      Nous pouvons donc admettre que le recours à César aboutit à l’acquittement de Paul. La suite de son histoire demeure obscure ; on la déduit d’allusions figurant dans les épîtres à Timothée et à Tite, et de la tradition. Il est possible qu’après son élargissement l’apôtre gagna, comme il en avait manifesté l’intention (#Ph 2:24 ; #Phm 1:22), l’Asie Mineure et la Macédoine. D’après #1Ti 1:3, Paul se rendit en Macédoine et chargea Timothée de diriger les Églises des alentours d’Éphèse. Nous ne savons pas où il se trouvait quand il écrivit la première lettre à Timothée ; #1Ti 3:14 révèle que l’apôtre espérait retourner bientôt à Éphèse. La lettre à Tite montre qu’il avait laissé ce disciple à la tête des Églises de la Crète et comptait hiverner à Nicopolis (#Tit 3:12). Trois villes portaient ce nom ; chacune pourrait être celle du passage cité : l’une en Thrace, à proximité de la Macédoine ; une autre en Cilicie, et une 3e en Épire, c’est probablement cette dernière que mentionne #Tit 3:12.

      En admettant l’antique tradition du voyage en Espagne (voir ci-dessus), nous pouvons supposer que Paul s’y rendit après avoir parcouru de nouveau l’Asie Mineure et la Macédoine. À son retour d’Espagne, il se serait arrêté en Crète et y aurait laissé Tite, puis serait revenu en Asie, d’où il aurait envoyé l’épître à Tite ; #2Ti 4:20 nous apprend que Paul passa à Corinthe et à Milet, donc en Grèce et en Asie. Rien ne prouve qu’il ait pu hiverner à Nicopolis. De nombreux exégètes pensent que l’apôtre n’atteignit pas Nicopolis d’Épire, mais fut de nouveau saisi et conduit à Rome. Les épîtres que Paul rédigea à cette époque nous fournissent quelques renseignements à son sujet : tout en évangélisant des régions nouvelles, il achevait d’organiser les Églises déjà fondées. Pressentant que sa carrière allait être brisée, et que les Églises courraient de nouveaux dangers, extérieurs et intérieurs, il écrivit les épîtres pastorales (les 2 à Timothée et celle à Tite), ultimes instructions concernant l’organisation des Églises et les problèmes qu’elles devront résoudre.

14. Dernière détention et martyre. La 1re captivité romaine prit probablement fin en 62 (ou 63) après Jésus-Christ. Paul aurait ensuite prêché l’Évangile pendant environ 4 ans. Eusèbe situe le martyre de l’apôtre en 67. Jérôme indique 68. Nous ne connaissons pas les circonstances de cette 2e arrestation. La 2e épître à Timothée, rédigée à Rome peu avant la mort de Paul, contient quelques brèves allusions à son emprisonnement. En 64, Néron déclencha la persécution contre les chrétiens de la capitale, et sans doute, elle se manifesta ça et là dans les provinces (#1P 4:13-19). Comme certains exégètes l’ont supposé, il se pourrait que l’apôtre ait été dénoncé par le nommé Alexandre (#2Ti 4:14). Quel que fût le lieu de son arrestation, Paul devait comparaître devant le tribunal de Rome. Motifs possibles : nouveau recours de l’apôtre à César ; inculpation de crimes, prétendus commis en Italie (peut-être de complicité dans l’incendie de Rome) ; désir des provinciaux de se faire valoir auprès de Néron en lui envoyant un prisonnier de marque. Lors de la rédaction de la 2e lettre à Timothée, Paul n’avait avec lui que Luc (#2Ti 4:11). Certains disciples l’avaient abandonné (#2Ti 1:15; 4:10,16), d’autres s’acquittaient au loin de divers services (#2Ti 4:10,12). Le tribunal impérial devant lequel Paul comparut de nouveau, ne le condamna pas d’emblée (#2Ti 4:17), mais le maintint en captivité. L’apôtre put peut-être prouver son innocence, mais resta prisonnier à cause de sa foi. Il parle de ses chaînes (#2Ti 1:8,16), dit qu’on le traite comme un malfaiteur (#2Ti 2:9) pressent quel sera son sort (#2Ti 4:6-8). Il est certain que finalement Paul fut condamné à mort ; sa profession de foi chrétienne suffisait pour cela, selon la politique inaugurée par Néron en 64. La tradition rapporte que l’apôtre, citoyen romain, fut décapité sur la route d’Ostie.

      Cette esquisse de la vie de Paul se fonde sur les Actes et sur les épîtres, mais il est clair que tout ne nous est pas raconté. Quelques textes laissent entrevoir bien d’autres épisodes de cette existence si mouvementée (#Ro 15:18,19 ; #2Co 11:24-33) (voir l’article suivant pour la suite).

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